Des confessions non autorisées
Comment Bourguiba limogea Hédi Nouira pour 20 minutes puis se ravisa .
Comment Bourguiba limogea Hédi Nouira pour 20 minutes puis se ravisa .
Par Dr Mokhtar ISMAIL
Sousse le 23/11/09
Le compte à rebours était trop serré pour si Driss qui ne savait plus ou donner de la tête. Moins de 24 heures le séparaient de l’heure fatidique de l’arrivée de si El Hédi à Bonn. Conscient de l’étroitesse de sa marge de manœuvre par les voies diplomatiques officielles ,Il m’adjurait de faire tout mon possible d’une façon informelle avec mes amis ouest- allemands en insistant sur le fait qu’il ne portait pas si El Hédi dans son estime et que tant pis en cas d’échec …pour la sermonna de de si El habib….… comme il se plait à l’appeler en son absence … question de vouloir m’impressionner …
Je ne m’attardais pas sur toutes les démarches que j’ai effectuées auprès de mes amis très influents dans le Ministère des Affaires Etrangères et le cabinet du chef de l’exécutif. La première difficulté à surmonter, est que le chancelier fédéral Schmidt s’envole dans l’avion de l’armée avec son épouse Loki pour leur Bungalow à Hambourg ,sa ville natale. Donc aucun rendez vous avec des personnalités étrangères, pas de Conseil de Ministres et week-end privé très récupérateur dès le jeudi soir .
Faut-il rappeler que :
Le combattant suprême nous annonça si Driss Guiga et moi ,vers 15 h - 15.30 ,lors de notre présence quotidienne à ses côtés , à l’un des salons du 2 é étage de l’universitaetklinik ,juste après sa sieste « Que si El Hédi ,arrivera de Washington ,via Paris le vendredi tôt le matin à l’aéroport Koeln –Bonn, par avion spécial du Tunis Air. Mettant son ambassadeur ,au pied du mur ,pour arranger une entrevue avec le nordiste très peu accessible le Chancelier fédéral socialiste, en coalition avec le parti libéral de Hans Dieter Genscher ,(aux tristes souvenirs du carnage des Palestiniens ,comme Ministre Fédéral de l’intérieur ,aux J.O de Munchen 72).
Pour Mr l’Ambassadeur Driss Guiga c’était quasi- impossible ,tant il est vrai ,que les délais étaient trop courts : 2 nuits et un jour pour convaincre Schmidt de voir Nouira ,un vendredi ,réservé à ses « week-ends » à Hambourg. Autres obstacles difficiles à franchir : les canaux officiels pour accéder au cabinet de Hans Dieter- Genscher ne permettent pas aux ambassadeurs accrédites à Bonn, d’approcher le chef de la diplomatie ouest-allemande.
En prenant congé du Président , à la tombée de la nuit ,si Driss ,ne me cachait pas ,son inquiétude de décevoir ,l’hôte du prof’ Hubert de ne pas réussir à arranger une rencontre Schmidt-Nouira .
Je savais que si Driss ,qui était, récemment, en poste à Bonn ne pouvait pas accéder à ces Énarques de l’Ausswaertisgsamt qui traitaient , ce genre de RDV sur des mois . Donc, impossible de leur suggérer ,la moindre proposition sur des heures. J’ai fait semblant de ne pas attacher une importance particulière à ce sujet que le combattant suprême considère comme un test de considération pour un Bourguiba pro-occidental et allié inconditionnel de la RFA (rappel de ses déboires avec Nasser et la Ligue Arabe au Caire à la cause de la RFA).
Le lendemain ,lors de notre visite matinale à Bourguiba, au Venusberg, Il pressa si Driss ,au sujet du RDV de son Premier ministre avec le chancelier Fédéral .
Pour ma part ,tout en amorçant mes contacts avec des amis sûrs des collaborateurs et collaboratrices, haut-placés de Genscher ,le vice –chancelier Fédéral auquel me liaient des relations amicales. Il a ,plusieurs fois , dégusté des langoustes croustillantes chez moi, ainsi que le Chancelier Fédéral Schmidt ,en l’honneur de mon ami et Pédégé de l’agence TAP si Mahmoud Triki qui était le Directeur des Affaires politiques de si El Hédi à la Kasbah.
Les contraintes de la concision m’obligent à dire tout de go : si Driss ,qui n’a pu approcher ses supérieurs Allemands, m’avait adjuré de me débrouiller avec mes vitamines B (Beziehugen ) (relations éclectiques dans le gratin politique de Bonn).
Je reconnais que grâce, à si Driss ,j’étais le seul non –diplomate (Directeur de l’agence TAP ) à rouler dans une voitures diplomatique O -138-02
Plaques réservées au N°2 de notre ambassade C'est-à-dire le Ministre plénipotentiaire ‘’carriériste’’ des Affaires Etrangères qui marquait si Driss à la culotte ,pour tenir informé , le chef de la diplomatie à Tunis, sur toutes les activités d’un Ambassadeur étranger a la caste des diplomates de carrière.
Imaginez la jalousie et l’intox’ dont J’étais l’objet ,ne serait-ce que pour cette faveur qui aurait été ,une première ,dans l’histoire de la diplomatie Tunisienne.
si Driss ,en fin politicien ex - super-Ministre de la première République –membre du B.P du PSD et en semi-retraite forcée chez les Allemands ,ne tenait pas compte de ces formalismes dus à l’hypocrisie mondaine. Ainsi, il m’avait mis dans la situation la plus favorable possible pour servir la Tunisie
En politicien averti il s’est vite aperçu de mon rayonnement auprès des germaniques. Ma connaissance de la langue de Goethe (doctorant à l’Uni’ de Bonn)et très bien apprécié chez mes collègues de la presse d’outre –RHIN et celle des Etrangers ) .
Il m’avait donné l’occasion ,d’étaler mon savoir-faire auprès des décideurs allemands. Il m’a aidé à faire mon apprentissage des acrobaties de la « realpolitik ».
Ainsi ,de retour à la résidence de Fasanenstr. au bord du Rhin il me pria de m’attarder chez lui ,au salon où la célèbre artiste-peintre, Son épouse Chacha Guiga ,nous accueilla avec beaucoup de tact et de finesse, comme à l’accoutumée, pour me chuchoter « Ecoutez si mokhtar ,vous savez que si EL Hédi ne fait pas partie de mes amis .mais si j’avais promis au Président …….de faire tout mon possible de lui arranger un entretien avec Schmidt …….c’est que je suis conscient de l’importance psychologique et morale qu’accorde le combattant suprême à cela .
Je vous fais confiance pour relever ce défi afin que nous puissions faire plaisir à notre leader ,en traitement chez le Prof’ Hubert .»
Faut -il rappeler que j’avais toujours eu la manie de renvoyer l’ascenseur même au détriment de mes intérêts égocentriques.
Bref, mes démarches ultra- confidentielles auprès du dernier carré des fidèles de Genscher n°2 de l’exécutif et patron des A.E) aboutirent miraculeusement.
Vers 21 .00h le téléphone sonna chez moi pour qu’une agréable voix féminine ait eu à me porter la bonne nouvelle. Tout se passa dans l’exceptionnel. Schmidt qui n’avait jamais reçu d’invités étrangers ,le vendredi, car son travail à Bonn se termine le jeudi à 21.00h pour s’envoler avec sa femme Loki ,dans l’avion de la Luftwaffe (Armée de l’air) dans la cour même de la chancellerie à 10.00 heures du matin, pour son bungalow de Hambourg au nord de la RFA.
La proposition de Genscher de recevoir si El Hédi ,pour quelques minutes vers 9.30h, par le patron de l’exécutif a été exaucée .
Sans perdre du temps et avec la naïveté de ceux qui se sont frottés ,sur le tard aux vices et aux coups fourrés des vieux briscards de la politique politicienne , J’appelais si Driss dans sa chambre à coucher pour lui dire , euphorique et jubilant , ça y est si EL hédi sera reçu, demain matin pour 5 minutes par le chancelier Schmidt . »
Euphorique et jubilant « J’appelais si Driss dans sa chambre à coucher, pour lui dire : « ça y est le Chancelier recevra demain le Premier Ministre du combattant suprême ! »
Ne croyant pas ses oreilles ……il m’intima l’ordre de le rejoindre pour qu’on aille tous les deux, annoncer la bonne nouvelle à Bourguiba. Quelques minutes me suffirent pour me pointer devant la résidence de la République Tunisienne .
Estomaqué, par la constat de voir les projecteurs d’un garage vide, allumés et l’absence de si Driss qui préféra rejoindre la clinique Venusberg sans moi. j’avais rebroussé chemin ,malgré l’insistance de Mme Chacha, d’attendre ,en sa compagnie, son retour .
Ce jour là, j’avais bien vérifié, à mes dépens, la saillie du Général De Gaulle qui disait « En politique il n’y a pas d’amis mais des intérêts »
Mais comme tous les natifs taureaux ,qui pensent, d’abord, aux intérêts des autres avant les siens, je continue ,comme par masochisme puéril, à faire usage de ce dicton de Fiodor Dostoïevski qui nous instruisait :« La peur de l’ennemi détruit jusqu’à la rancune à son égard. »
C’est le drame dans je m’ensevelis jusqu’à ce jour.
Mes désagréables surprises avec si Driss ,en marge de la visite -éclair de si El Hédi chez Bourguiba à Venusberg (Bonn), après le périple de Washington ,continuèrent de plus belle. En accompagnant l’Ambassadeur, le personnel de la chancellerie et les responsables du gouvernement fédéral à l’aéroport de Koeln/Bonn par un certain jour glacial et enneigé du mois de Décembre 1978 .
Avant d’arriver au 2e étage du pavillon privé, hautement surveillé de Bourguiba l’un des motards de l’escorte de si El Hédi effectua ‘’un salto’’ aussi spectaculaire que dangereux sur la route grimpante de Venusberg .c’était le présage d’autres surprises désagréables pour si El hedi et moi-même.
A l’arrivée « au territoire Tunisien chez Bourguiba » (2 e étage totalement réservé à l’hôte de la RFA ),j’étais sceptique de voir Bourguiba ,attendre si El Hédi à l’entrée du pavillon ,mon équipe TV réquisitionnée auprès des ouest –allemands, était en place .
Après les salutations d’usage ,Il intima l’ordre à si El Hédi de l’accompagner à sa chambre à coucher tout en me jetant un regard perçant et agitant sa canne avec nervosité : s’exclama : « Laissez moi seul ,avec si El Hédi»
L’attente durera plus de 20 minutes .
Une discussion houleuse entre le combattant suprême et son Premier Ministre permit à si Driss d’aller téléphoner au 2é salon du pavillon à la Majda , lui annonçant : « si El Hédi c’est fini ,il n’est plus Premier Ministre …..pensez à moi yallah Wassila...si ce n’est pas possible je serais votre serviteur à l’Intérieur ou aux Affaires Etrangères »
La voix de Bourguiba est devenue progressivement, plus basse, moins menaçante, voire conciliante et attendrie .
Puis ,soudain sortant, bras dessus-bras -dessous avec si El Hédi, pointa sa canne à quelques centimètres de mon visage ,puis regarda les cameras à mon service pour dire sur un ton ému, les larmes aux yeux « si El Hédi est mon compagnon de prison pendant 5 ans …… »Jetant un regard furtif sur si Driss ,le joker de la Majda, je fus hébété de voir la tête de mort, en plein désarroi qu’il fit .
Nous étions très pressés de joindre Helmut Schmidt qui avait bien voulu recevoir ,un économiste avisé comme lui ,le Premier Ministre Tunisien ,de retour de Washington chez Carter.
Tout se passa merveilleusement bien chez le Nordiste Ouest Allemand.
Mieux encore J’avais déjoué l’attention du protocole allemand pour réaliser l’un des meilleurs « scoop » de ma vie journalistique.
Je n’avais pas oublié de profiter d’un moment de récupération de la part de si El Hédi ,pour le mettre au parfum du téléphone arabe ayant fonctionné entre Venusberg et Carthage, pendant que Bourguiba sermonnait si El Hédi en aparté…..
Les 5 minutes promises par le chancelier Schmidt subirent une implosion pour que son tête- à- tête avec si El Hédi atteignasse 90 minutes.
Sur le perron de la chancellerie ,je fonçais ,sur les deux personnalités , avec cameramen , ingénieur-son et micro pour interviewer Schmidt .
Malgré la méthode musclée qu’ utilisèrent sa garde rapprochée et son chef de protocole pour me neutraliser .
Je n’aurais eu mon salut que dans la gentillesse de Schmidt qui avait l’habitude de répondre à mes questions dans les points de presse et les diners mensuels réservés aux journalistes étrangers .
Ma journée de grâce continua avec l’émission TV que j’injectais dans Le JTA de la RTT par satellite à partir de Hambourg dont le coût était de 2 mille DT par jour totalement réglés par les Allemands .J’intitulais mon reportage « A la clinique de Venusberg , Bourguiba confirma si El Hédi Nouira dans son poste de Premier Ministre .»
A 14 heures , au cours du déjeuner ,offert par Si Driss et Mme Chacha , en l’honneur de si El Hédi dans la somptueuse résidence au bord du Rhin ,Notre Premier Ministre a tenu à adresser des flèches fielleuses au Joker de la Majda en déclarant ,solennellement « ça m’a fait un grand plaisir de trouver à Bonn ,deux Ambassadeurs de Tunisie, l’un officiel Si Driss Gigua et l’autre officieux ,Si Mokhtar Ismaiil……… »
Depuis ce déjeuneur au bord du Rhin,à la ville natale de Beethoven et le Chancelier Fédéral konrad Adenauer, mes ennuis avec les proches de la Majda n’ont pas connu de fin…..